Dans la série, chronique ordinaire d’un conseiller immobilier ordinaire, j’ai voulu une fois n’est pas coutume, vous partager une anecdote…

Alors que j’intervenais dans une séance de travail avec plusieurs de mes collègues en ce lundi 5 février, j’observai du coin de l’oeil un brin déstabilisé, un de mes confrères bien en peine à soutenir son attention.
Je le voyais ostensiblement, malgré ses efforts, piquer du nez tel un avion bi-moteur en détresse au beau milieu du triangle des Bermudes.

Evidemment je me remettais en question, soupçonnant que mon propos devait être soporiphique, barbant, pour tout dire ennuyeux. Ou peut-être était-ce la forme de mon intervention qui était en cause. Voire les deux !

Et que n’allais-je apprendre de son propre aveu ?

Mon collègue avait travaillé dur pendant le week-end, s’était couché tard pour préparer son rendez-vous du lendemain et avait vécu la mésaventure que je m’en vais vous narrer :

Lapin mon p’tit lapin…

Appelons notre ami G. L’intéressé se reconnaîtra s’il lit ces quelques lignes :
Ah, les lundis matins à Paris, avec leur charme indéniable des rames de RER bondées, entravées de malaises voyageurs et autres « attentes pour régulation, merci de patienter »…
Ah les lundis matins d’hiver gris bleus, fouettés par la bruine, éclairés des visages radieux des citadins épanouis à l’idée de rejoindre leur lieu de travail… Quelles belles surprises toujours renouvelées !

Ce lundi-là, à 8h30 précisément, immaginons G devant un bel immeuble haussmannien, prêt à rencontrer un client pour une estimation. Mais voilà, le client, semblait avoir adopté la poctualité d’un chat fuyant l’eau. Après une attente qui durera une éternité (ou au moins le temps de boire deux cafés et de résoudre trois équations différentielles ou polynomiales, au choix), G reçu un message de son client, à peu près du genre : « Désolé, je ne pourrai pas être là, mon poisson rouge avait un entretien d’embauche ce matin, et je ne pouvais décemment pas le laisser y aller seul. »


Vous imaginez aisément dans quel état psychologique un conseiller immobilier peut se trouver au moment précis du raccroché du téléphone, voire mieux encore, à la lecture du texto laconique, froid, sur l’écran noir de son smartphone. Parfois, des envies de meurtre surgissent l’espace d’un furtif instant. Si si ! Mais dans ce cas précis, le conseiller immobilier expérimenté connaît le geste qui sauve : la résillience.


Dans l’esprit de cette anecdote, et par pure compassion soudaine et solidaire avec mon collègue G pris de somnolence l’après midi, je me suis amusé à imaginer dix prétextes bidons, oscillant entre l’absurde et l’ironique, pour justifier un « lapin » que certains d’entre vous relèverons peut-être avec malice anticipée. Commençons par le régional de l’étape, du côté de la Bretagne par exemple :

  1. « Je suis désolé, j’ai dû urgemment participer à une compétition de lancer de crêpes. Mon honneur breton était en jeu. »
  2. « Mon réveil et moi avons eu une mésentente philosophique sur la notion de temps, et il a décidé de ne pas sonner ce matin mais d’invoquer Schopenhauer, tel le pendule oscillant invariablement entre la douleur et l’ennui »
  3. « J’ai participé au dépouillement de la votation citoyenne sur les SUV à Paris, puis à cette occasion ai échangé mes chaussures avec un clown et je ne peux décemment pas sortir avec ces grandes pointures. »
  4. « Ma plante d’intérieur semblait déprimée, j’ai dû organiser une séance de thérapie d’urgence pour elle. Lacan et Freud n’étant plus de ce monde, j’étais fort démuni à chercher dans les pages jaunes. »
  5. « Je suis tombé dans un trou spatio-temporel en ouvrant mon placard. Je viens tout juste de revenir, quelle aventure ! »
  6. « Mon chat a décidé de se lancer dans une carrière de DJ et à pris ma maison pour une rave party toute la nuit. Impossible de fermer l’œil ! »
  7. « J’ai été kidnappé par des écureuils qui exigeaient une rançon en noisettes. Négociations difficiles, digne de quelques aller-retours entre vendeur et acquéreur sur un bien immobilier disputé. »
  8. « Je devais absolument finir de regarder ma série. Vous comprenez, le suspense était insoutenable. »
  9. « Ma grand-mère a décidé d’escalader l’Everest ce matin. J’étais en visioconférence avec elle pour l’encourager. »
  10. « J’ai découvert que j’étais un personnage de roman et j’ai dû négocier avec l’auteur pour un meilleur arc narratif avant de pouvoir sortir. En plus d’un pourcentage sur les droits d’auteur… évidemment, ce qui a pris davantage de temps que prévu. »

Ces prétextes, aussi farfelus soient-ils, rappellent que l’humour et la légèreté peuvent transformer les petites tracas du quotidien en moments de partage et de rire. Mieux vaut en rire et passer à autre chose. Car au passage, G est un super agent. Et ce client visiblement ne le méritait probablement pas, ou pas encore assez. Au choix.

Poser un lapin… vu par Muriel Robin



By Pierre Peyrard

Conseiller immobilier équipié de Catherine Jacques à Paris au sein de l'agence Kw Fortis Immo, réseau Keller Williams. Je suis aussi musicien, pianiste, auteur compositeur interprète sous le pseudonyme "Pierre de Frebourg".

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